La quatrième cohorte du Programme de renforcement des capacités internationales (PRCI) a été officiellement lancée le 1er novembre 2023. Quatre équipes-pays du Kenya, du Nigéria, d'Afrique du Sud et de Zambie participeront à ce programme d'apprentissage par l'action qui applique l'adaptation itérative pour la résolution de problèmes (PDIA) pour régler des problèmes complexes de politique et d'administration.
Le programme met l'accent sur la discipline fiscale volontaire (DFV) en tant que stratégie de mobilisation des recettes intérieures (MRI). L'amélioration du respect spontané des obligations fiscales, ou du civisme fiscal, a le potentiel d'augmenter les recettes fiscales avec (relativement) peu d'efforts d’imposition à faire. Le civisme fiscal, généralement défini comme la motivation intrinsèque à payer l’impôt, est une caractéristique essentielle sur laquelle la plupart des systèmes fiscaux s'appuient pour mobiliser la majeure partie de leurs recettes. (OCDE 2019 : Civisme fiscal – Qu’est-ce qui motive les particuliers et les entreprises à payer des impôts). L'importance de la confiance et de la DVF est particulièrement importante lorsque les pays ont l'intention d'élargir leur assiette fiscale. Il est tout simplement trop onéreux de s'appuyer sur des mesures de contrôle, telles que des audits, pour générer suffisamment de recettes fiscales avec une large assiette fiscale. Les administrations fiscales peuvent prendre un grand nombre de mesures (c'est-à-dire assurer un traitement juste des contribuables, agir de manière transparente, utiliser le pouvoir pour renforcer la confiance, la communication, la coopération) pour accroître la confiance à leur égard et renforcer ainsi la DVF des citoyens et des entreprises. La confiance des contribuables dans les institutions publiques est particulièrement importante pour accroître le respect volontaire des obligations fiscales, tout comme la confiance entre contribuables, c'est-à-dire la confiance dans le fait que les autres contribuables sont et seront également conformes.
Partout dans le monde, les administrations sont actuellement aux prises avec les implications de la transformation numérique pour améliorer le recouvrement des impôts et le respect des obligations fiscales. À cet effet, l'OCDE a défini une vision de l'administration fiscale 3.0 (Tax Administration 3.0 ou TA 3.0), en vertu de laquelle l'imposition devient un processus plus transparent et sans friction au fil du temps – en d'autres termes, « l'impôt arrive tout simplement ». Essentiellement, plus il devient possible d'interconnecter les différents systèmes que les contribuables utilisent pour gérer leurs affaires, effectuer des transactions et communiquer, plus il devient possible d'inclure les processus fiscaux dans ces systèmes. Cette inclusion pourrait permettre d'intégrer la conformité dans un nombre croissant de domaines, de rapprocher la fiscalité des événements imposables et de réduire considérablement les charges qui peuvent découler de l'utilisation de processus fiscaux différents de ceux utilisés dans la vie quotidienne et les entreprises des contribuables (rapport de l’OCDE 2020 : Tax Administration 3.0 : The Digital Transformation of Tax Administration).
Dans ce contexte, la confiance et la discipline volontaire seront-elles toujours pertinentes pour augmenter les recettes fiscales ? Si l'impôt arrive automatiquement, faudra-t-il faire confiance à l'administration fiscale et donc être prêt à s'y conformer volontairement ? À première vue, on pourrait être enclin à répondre par la négative.
Cependant, même si toutes les visions d'une TA 3.0 deviennent réalité (ce qui est loin d'être certain), la confiance et la discipline volontaire resteront un élément important de la stratégie d'une administration fiscale, mais pour des raisons différentes : les administrations fiscales constituent une partie essentielle d'un État, et la confiance dans l'administration fiscale contribue à la confiance envers le gouvernement et dans le « système » dans son ensemble. Par extension, la confiance placée dans l'administration fiscale représente la confiance dans le respect du contrat social. Et selon la théorie du contrat social, lorsque les gouvernements ne parviennent pas à garantir ou à satisfaire les meilleurs intérêts de la société, les citoyens peuvent se soustraire à leur obligation d'obéir ou changer les dirigeants par des élections ou d'autres moyens, y compris, dans des circonstances extrêmes, par la violence.
Par ailleurs, en rapprochant les processus de discipline des contribuables, les administrations s'appuieront essentiellement sur des « mesures intrusives » pour faire respecter l’observation fiscale. L'étendue de la responsabilité de l'État s'accroît donc : il faudra que les contribuables fassent davantage confiance dans le fait que les administrations utiliseront leurs informations de manière éthique et compétente pour déterminer leur assujettissement à l’impôt et pour administrer les ressources fiscales de manière efficiente et efficace.
En conclusion, nous soutenons que dans un monde de plus en plus numérisé, les administrations fiscales devront continuer à trouver différentes façons de soutenir et de maintenir la confiance du public, étant donné qu'elles jouent un rôle essentiel dans le respect du contrat social et que la portée de leur responsabilité augmente avec des mesures plus intrusives pour assurer l’observation fiscale.
En janvier et février, les équipes-pays participant au PRCI assiteront à une série d'ateliers visant à analyser les différents problèmes de politique et d'administration fiscale qui entravent la MRI dans leur propre pays. Ces ateliers permettront également de contribuer et de réfléchir aux principaux déterminants de la confiance qui influent de manière significative sur ces problèmes.